Scrap s'asperge le visage d'eau froide. Elle a vraiment l'impression d'avoir dormi aussi bien que pliée en douze sur un tapis de clous couverts de braises. Elle se regarde dans le miroir en baillant, ne prend pas le peine d'essuyer son visage et sort de la salle de bain, cherchant son paquet de cigarettes. Il doit être quoi... neuf heures du mat. À sa fenêtre, toujours en sous-vêtements, elle allume sa clope et la pose sur ses lèvres, se servant un thé. Elle n'a rien d'autre à foutre que de regarder le brouillard flotter dans la rue. Techniquement si, elle a un moteur à réparer, mais ce moteur, il est tout rouillé, dégueulasse et même pas intéressant. Alors elle fera ça un autre jour, dans longtemps. Très longtemps. Oui, elle préfère regarder les oiseaux passer dans le brouillard.

Deux grandes ailes blanches agitent le brouillard, Scrap scrute l'entrée de l'atelier sous sa fenêtre. Un facteur ? Elle n'avait pourtant vu que des pigeons distribuer les lettres. Peut-être qu'il y avait certains cas spéciaux.
Elle ne reçoit que très rarement du courrier. Sa curiosité piquée, elle écrase le reste de sa cigarette dans sa tasse de thé vide et descend les escaliers calmement, se passant les mains sur le visage pour tenter une énième fois de se réveiller. N'étant pas quelqu'un de pudique du tout elle n'a pas pris la peine d'enfiler un pull, et puis, elle va juste chercher son courrier. Son visage garde son expression blasée, en plus elle a les cheveux dans la face, une bonne tête de quelqu'un qui n'a pas dormi de la nuit.
Son atelier est en bordel, plus que d'habitude – ya du laisser aller en ce moment – elle grommelle et pose sa main sur la poignée, puis tire la porte vers elle en baillant. Un mec de sa taille est là, juste devant elle. Les grandes ailes blanches sont les siennes. Scrap balade son regard sur son corps. Putain ce qu'il est beau ce con.

Elle croise son regard, et sourit aussi. Un sourire captivant.
À Londres les seuls postiers qui venaient étaient petits, maigres et moustachus, l'air heureux sur leur vélo. Des chouettes petits messieurs qui ont un chat et une femme chez eux.
Lui c'était différent, bien différent. Elle prend la lettre de sa main et la pose sur l'établi à côté de la porte. Puis elle s'approche un peu, doucement, comme pour l'observer de près.
De très près.
Personne dans la rue, trop de brouillard, et il fait froid. Personne ne voit rien.

Plongeant son regard dans le sien une dernière fois, elle ferme les yeux. Elle répond à son baiser. Comme à son habitude. Joueuse ; douce ; attirante. Elle s'amuse un petit peu sur ses lèvres, les mordillant sur la fin.
Pendant qu'elle passe sa main gauche dans sa nuque, elle rouvre les yeux et lui sourit une seconde fois. Cette journée brumeuse cramoisie commençait bien, finalement.
Puis elle le tire vers elle, ils sont presque collés l'un à l'autre. Elle le voudrait bien pour elle toute seule, le facteur. Elle lui fait savoir en reculant d'un pas, dans l'atelier.

Sa respiration s'accélère quand elle se retrouve dos au mur. D'un habile mouvement de jambe elle ferme la porte, rien ne pourrait les déranger. Lentement ses mains descendent dans le dos du jeune homme, jusqu'à son bassin, prenant soin de passer sur ses côtes pour éviter ses ailes.
Ses ailes blanches. Elle les fixe une seconde, comme si elle venait à peine de les remarquer.
Mais son attention se reporte rapidement sur lui. Son visage. Ses yeux. Ses lèvres.
Elle revient les goûter l'instant d'après avec passion, attirant un peu plus son corps contre le sien. Le contact de leur peau la fait frissonner. C'est vrai qu'il sortait juste du brouillard.

Un soupir de plaisir s'échappe de ses lèvres, et elle se cambre un peu sous les douces mains du facteur. Une pensée traverse son esprit, le temps de quelques frissons. C'est comme un mauvais scénario de film de fesses.
Elle lui sourit, ses yeux plongés dans les siens, puis tend le cou, venant mordre ses lèvres. Parallèlement, sa main droite vient se glisser sur le bas de son ventre, puis s'aventure lentement un peu plus bas, sous le tissus.
Joueuse. Elle a toujours été joueuse. Ses doigts toujours malicieux.

Finalement elle l'embrasse avec passion, et de son autre main l'approche plus près d'elle. Comme s'ils n'étaient pas déjà assez proches.